Comment l'Église catholique a fait émerger les sciences rationnelles en Europe occidentale

On considère souvent les rapports entre l'Église catholique et la science comme conflictuels, voire incompatibles. Mais qu'en est-il réellement ? Pourquoi la science moderne ne s'est-elle développée que dans le monde chrétien, à partir du Moyen-âge ?
Étudions la question.





Cours de géométrie - Enluminure illustrant une traduction médiévale des Éléments d’Euclide (1310) The British Library Burney

Les penseurs et philosophes des civilisations sumériennes, mésopotamiennes, assyriennes, chinoises, égyptiennes, grecques, romaines, perses, arabes ont observé les étoiles pendant des millénaires, traçant des cartographies précises du ciel, relevant méticuleusement les trajectoires des planètes parmi les constellations, calculant les périodes d'équinoxes et de solstices...
Alors pourquoi aucune loi scientifique n'a-t-elle été trouvée par ces civilisations, certaines ayant plusieurs siècles d'existence ? Pourquoi ces savants sont ils restés muets devant les messages de la nature, incapables de les déchiffrer et de proposer des principes scientifiques universels, en restant sur une méthodologie descriptive intégralement empirique tout au long des siècles ?

LE PAGANISME, OU LA DÉIFICATION DE LA NATURE

Les sciences païennes, si on peut parler de sciences (mésopotamiennes, asiatiques, égyptiennes, grecques, romaines, perses, arabes, mayas, ...) sont basées sur l'observation de la nature et de leurs Dieux magiques (Dieu du Soleil, de la Lune, de la Terre, du Vent, de la Mer, de la Forêt,..). La déification des phénomènes naturels empêche chez les penseurs la construction d'une méthodologie scientifique rigoureuse pour comprendre les lois de la nature, tout simplement parce que des Dieux ne peuvent être soumis à une quelconque loi physique ou mathématique. Les dogmes formulés restent donc empiriques.

La science se construit alors sur la magie et l'alchimie. Le monde aristotélicien des philosophes grecs repose essentiellement sur les quatre éléments (feu, terre, eau, air) composant le monde, les trajectoires rectilignes du monde corrompu sublunaire, et parfaitement circulaires dans le monde pur de l'au-delà, la théorie des humeurs en médecine (Galien, Hippocrate). Ces dogmes présentent des incohérences totalement irrationnelles du point de vue de la formulation scientifique mathématique.

Plus foncièrement, le paganisme hérite du monisme, les Dieux et la nature ne forment qu'une seule et même entité, qui ne peut donc être soumise à des lois rationnelles et scientifiques.

Ce paganisme, qui freine le développement scientifique depuis des siècles, va être combattu de manière radicale par l'Église catholique.

L'ÉGLISE CATHOLIQUE CONDAMNE LE PAGANISME

Dès la genèse du christianisme, les fidèles respectant les Évangiles seront confrontés aux hérésies païennes : en refusant l'adoration des Dieux païens et les sacrifices, ils seront marginalisés et très longtemps persécutés, en particulier sous l'empire romain, de 60 à 310, par les empereurs Néron, Trajan, Hadrien, Antonin, Marc Aurèle, Dèce, Valérien, Dioclétien pour ne pas avoir voulu adorer les Dieux de la nature.
Le dogme de l'Église catholique va tout mettre en œuvre pour mettre fin à ces hérésies païennes. Christ Jésus, sauveur de l'Humanité, sacralise la place de l'homme au sein de la nature, car il est fait à l'image de Dieu.
Il y a transcendance de l'esprit humain sur la nature. Cette
transcendance s'oppose au monisme.
Dieu donne à l’homme le jardin pour qu’il le cultive, profite de ses fruits, de sa production, en prenne soin et le garde :
"L’Éternel Dieu prit l’homme, et le plaça dans le jardin d’Éden pour le cultiver et pour le garder."
Genèse 2:13

Avec le Christianisme, la déification de la nature cesse d'être un dogme.


LA RÉINCARNATION CYCLIQUE ET INFINIE DES RELIGIONS ASIATIQUES NIE LE SALUT DE L'HOMME

Dans la plupart des religions païennes, en particulier indiennes et asiatiques, l'homme est sujet à la réincarnation. Il est enfermé dans un cycle périodique infini, source de philosophies non progressives.
L'esprit de l'Asie se répercute sur la symbolique, globalement cyclique, circulaire, qui stagne dans le temps long et répétitif.
Il ne peut y avoir de recherche du salut de l'homme, puisqu'il est condamné à se réincarner indéfiniment.


Le grand symbole de l'Orient qu'est le serpent se mordant la queue (Ouroboros) représente typiquement cette idée de récurrence, commune aux philosophies et religions asiatiques, comme la roue symbole du Bouddhisme (Dharmachakra) et sa Réincarnation, les cycles de 4 200 000 ans du Yuga qui se répètent à l'infini, ou encore le Yin et le Yang.
Cette forme circulaire inclut tout : le début et la fin, retourne vers le néant pour renaître à nouveau. Elle condamne donc l'homme à une errance éternelle, sans but.


Dans la symbolique chrétienne, au contraire, la Croix étend ses bras vers l'Autre, invite à la recherche du bien, de la justice pour le salut de l'âme.


LA RECHERCHE DU SALUT INVITE AU QUESTIONNEMENT ET S'OPPOSE À LA RÉINCARNATION

Dans la Bible, Dieu questionne l'homme et l'invite à trouver le salut :
"Vous êtes la lumière du monde. Une ville située sur une montagne ne peut être cachée; et on n'allume pas une lampe pour la mettre sous le boisseau, mais on la met sur le chandelier, et elle éclaire tous ceux qui sont dans la maison."
Matthieu 5:14-15

L'homme n'a qu'un passage sur Terre, donc qu'une seule chance de se réaliser, il sera alors jugé sur ses actes (Apocalypse).




James Clerk Maxwell est un des plus grands physiciens du XIXème siècle et de tous les temps, il est connu pour l'application des statistiques et des probabilités à la théorie des gaz, ce qui fait de lui le fondateur de la physique statistique, mais surtout le découvreur des équations de l'électromagnétisme qui régissent tous les phénomènes électriques et magnétiques, de l'optique ondulatoire, de la propagation de la lumière et tous les signaux sous forme d'ondes qui permettent à vos téléviseurs et smartphones de recevoir et d'émettre de la vidéo, des images et du son.
Éduqué très religieusement, à huit ans, Maxwell pouvait réciter des versets des psaumes entiers de la Bible, et il a acquis de solides connaissances théologiques.
Le salut Biblique, vu par Maxwell, dans une lettre adressée à un ami :
"Je pourrais devenir plus méchant que n'importe quel exemple que l'homme pourrait me donner, si j'échappe à cela, c'est uniquement par la grâce de Dieu qui m'aide à m'en défaire, en partie grâce aux sciences, plus complètement grâce à la société, non parfaitement, à moins de m'engager totalement vers Dieu."
"The life of James Clerk Maxwell" Lewis Campbell and William Garnet - (1882) p189

Voici comment Maxwell considère sa religion dans une lettre adressée à son collègue Lewis Campbell, une critique virulente du paganisme :
"Je me réserve le droit de m'introduire et de supprimer les obstacles que les hommes ont mis sur la Terre Sainte.
je suis maintenant convaincu que seul un Chrétien peut enlever de son territoire ces obstacles. Je ne prétend pas qu'il n'y ait pas eu des Chrétiens qui aient placés de tels obstacles, beaucoup en ont mis certes, et chacun en a posé aussi, mais il y a d'importantes et extensives parties du territoire des Moqueurs, des Panthéistes, des Quiétistes, des Formalistes, des Dogmatistes, des Sensualistes, et le reste, qui sont ouvertement et solennellement tabous."
"The life of James Clerk Maxwell" Lewis Campbell and William Garnet - (1882) p178



L'ÉGLISE CATHOLIQUE LIVRE UN COMBAT SANS MERCI CONTRE LE NON RATIONALISME : DÉFAITE DU SYSTÈME ARISTOTÉLICIEN, DU MONISME ET DE LA MAGIE

La pensée héritée de la philosophie grecque païenne d'Aristote qui sclérose la science depuis plusieurs siècles, en confondant religion et science (monisme), va être attaquée de front par l'Église catholique dès le XIIIème siècle.




Discussion entre docteurs et théologiens de l'Université de Paris (miniature XVIème siècle)

Le 7 mars 1277, l'évêque de Paris, Étienne Tempier, condamne la doctrine d'Aristote en relevant "219 erreurs exécrables que certains étudiants de la faculté des arts ne craignent pas de traiter et de discuter dans les écoles".
Pour le physicien, chimiste, épistémologue et historien des sciences du début du XXème siècle Pierre Duhem, cette condamnation d'Étienne Tempier promulguée à l'Université de Paris marque le début du rationalisme scientifique :
"S'il nous fallait assigner une date à la naissance de la science moderne, nous choisirions, sans doute, cette date de 1277...Comprise comme une condamnation du nécéssitarisme grec, elle conduira nombre de théologiens à affirmer comme possibles, en vertu de la toute-puissance du Dieu chrétien, des positions scientifiques et philosophiques traditionnellement jugées impossibles en vertu de l'essence des choses...La notion d'un Dieu théologiquement puissant a libéré les esprits du cadre fini où la pensée grecque avait inclu l'Univers."

Au moyen-âge, l'Inquisition combat l'hérésie païenne, la sorcellerie et la magie, dans la droite ligne d'Étienne Tempier, elle va alors représenter une étape fondamentale pour démystifier les sciences occultes. L'Inquisiteur Bernard Gui au XIII-XIVème siècle explique dans son "Manuel de l'Inquisiteur" que :
"La peste et erreur des sorciers, devins et invocateurs des démons revêt, en diverses provinces et régions, des formes nombreuses et variées en rapport avec les multiples inventions et les fausses et vaines imaginations de ces gens superstitieux qui prennent en considération les esprits d'erreur et les doctrines démoniaques."



Dans son "Dialogue sur les deux grands systèmes du monde", le physicien Galilée a tenté lui aussi de continuer à mêler étroitement les Écritures Saintes et la science, comme le faisaient les païens grecs, en érigeant en vérité des hypothèses non vérifiables scientifiquement à l'époque, ce qui lui vaudra une condamnation par l'Église.
Par ailleurs, Galilée ignore volontairement et discrédite l’œuvre de l'astronome Johannes Kepler, qui a pourtant mené une analyse mathématique profonde des trajectoires des planètes, en arguant qu'elle « ne vaut même pas un pour cent de mes pensées ».


Giordano Bruno est un prêtre dominicain hérétique ayant vécu à la fin du XVIème siècle. Excommunié par l'Église catholique pour avoir
blasphémé contre la Sainte Trinité, Jésus Christ et la Vierge Marie, il a cependant continué de propager ses hérésies pendant plus d'une dizaine d'années à travers toute l'Europe malgré les avertissements répétés de l'Église.
Giordano Bruno n'était pas physicien, il rejetait la trigonométrie naissante, et considérait la rigueur des mathématiques appliquées aux astres et à la nature comme une hérésie et un mensonge.
Giordano Bruno paraît donc d’accord avec Aristote pour faire des mathématiques une science facilement accessible à l’esprit humain mais abstraite, qui ne permet pas de connaître les choses naturelles, et dont la pratique est vaine pour qui cherche à comprendre la substance des chose. Le "Cantus Circaeus" affirme ainsi l’inutilité de l’abstraction mathématique :
"Les sujets purement mathématiques ne peuvent être d’aucune utilité, dans la mesure où ils sont abstraits"

Pour Giordano Bruno, l'Univers est un tout formé d'objets interconnectés par des liens magiques, mêlant alchimie et ésotérisme, héritage de théories hermétiques non rationnelles, qu'il utilise pour discréditer l'Église catholique et tromper les bonnes âmes en Europe.
Dans des ouvrages tout aussi incantatoires les uns que les autres, comme "De la magie", Giordano Bruno explique comment les démons nous parlent, et enseigne une doctrine moniste où toutes les choses de la nature, des pierres aux plantes ont une âme. Ce qui empêche tout raisonnement rationnel et scientifique  :
"Il y a analogie avec la situation de qui désire éveiller l'attention : à une certaine distance, il doit élever la voix, afin que ses propos parviennent par la voie auditive au sens interne de l'autre : alors que de près, il suffit de murmurer à l'oreille. Un démon n'a pas besoin de la voix, ni même du murmure : il pénètre directement le sens interne, comme on l'a dit. C'est ainsi que les démons envoient des songes, font entendre des voix et voir des choses étranges, mais aussi suggèrent à l'état de veille certaines pensées dont nous ignorons qu'elles nous sont dictées par une force extérieure, tantôt inculquant une vérité par énigmes, tantôt la signifiant plus nettement ; s'appliquant peut-être, d'autres fois, à nous tromper."

"Venons-en maintenant à des questions plus précises. Les mages ont pour axiome qu’il faut, en toute œuvre, garder à l’esprit que Dieu influe sur les dieux ; les dieux, sur les corps célestes ou astres, qui sont des divinités corporelles; les astres sur les démons qui sont gardiens et habitants des astres - au nombre desquels est la Terre; les démons sur les éléments, les éléments sur les corps composés, les corps composés sur les sens, les sens sur l’animus, et l'animus sur l’être vivant tout entier : ainsi descend-on l’échelle."

Giordano Bruno n'est donc pas un scientifique, il propagera ses théories irrationnelles mélangeant ésotérisme et religion, qu'il s'acharnera à faire passer non pas comme des hypothèses, mais comme une vérité absolue.
Les thèses de Giordano Bruno peuvent aujourd'hui prêter à sourire, mais à l'époque, elles constituaient un obstacle considérable à l'avancée de la connaissance scientifique.

Polémique autour de la condamnation au bûcher de Giordano Bruno

Pour ses thèses hérétiques, Giordano Bruno a été emprisonné et jugé pendant huit ans (1592-1600), il fut condamné par le pape Clément VIII et remis au bras séculier, pour le punir « avec autant de clémence qu'il se pourrait et sans répandre de sang ».
Jusqu'à preuve du contraire, il est difficile de croire que Giordano Bruno ait été brûlé à Rome en place publique le 17 février 1600.
D'une part, parce que l'Inquisition n'avait jamais fait brûler personne à Rome jusque là, et que d'autre part, parce que cet événement aurait eu un tel retentissement public, que l'on aurait eu à disposition plusieurs sources qui relateraient ces faits (l'imprimerie existait déjà).

Le seul document existant sur la mise au bûcher de Giordano Bruno est une copie d'une lettre soi-disant écrite par Gaspard Schopp éditée dans le livre "Machiavellizatio" publié en 1621, (donc 21 ans après les faits) dont on ne connaît ni l'auteur, ni l'éditeur.
En 1680, un érudit connu sous le nom de Nicodemus essaya de vérifier les assertions de Jean Ursin dans la lettre de Schopp :
« Le sieur Nicodème, dit Bayle, dans ses Additions à la bibliothèque de Naples, dit qu’on ne sait pas certainement si tout ce que Jean Ursin débite est véritable. Voilà qui est singulier. On ne sait pas, au bout de quatre-vingts ans, si un Jacobin a été brûlé à Rome en place publique pour ses blasphèmes. Il n’y a pas loin de l’incertitude à la fausseté dans les faits de cette nature."
Donc, en 1680, on est déjà incapable de prouver que Giordano Bruno ait été brûlé en place publique ! Si un tel événement aussi tragique avait eu lieu, comment aurait-t-il pu échapper aux humanistes de la Renaissance, aux écrivains, et aux philosophes de l'époque ?


Statue de Giordano Bruno, érigée par le sculpteur et Grand-Maître du Grand Orient d'Italie, l'anticlérical Ettore Ferrari, sur la place Campo de Fiori à Rome en 1889.

Il est tout à fait ironique ici de constater
le renversement des valeurs.
Giordano Bruno, icône censée incarner auprès des franc-maçons, athées et "libre-penseurs" le combat de l'esprit scientifique contre l'obscurantisme de l'Église catholique, était en fait un véritable adorateur des mages, pratiquant l'alchimie, l'ésotérisme et la sorcellerie, puisque il se vantait de pouvoir communiquer avec les démons. Ce que l'Église catholique condamnait !

Giordano Bruno est aujourd'hui une représentation symbolique caractéristique de l'errance de l'athéisme.


L'ÉGLISE CATHOLIQUE, INSTIGATRICE DE LA SCIENCE RATIONNELLE


Le physicien, mathématicien et théologien du Moyen-âge normand Nicole Oresme, formé au collège de Navarre fondé en 1304 par Jeanne reine de Navarre, a établi mathématiquement, dans son "Traité sur la configuration des qualités et du mouvement", la loi fondamentale du mouvement rectiligne uniformément accéléré, à savoir que si la vitesse à l'instant zéro est nulle, la distance parcourue est proportionnelle au carré du temps. Il est également à l'origine du principe d'inertie, un objet non soumis à une force, continue son trajet sans résistance  :
«quant Dieu créa les cielz, il mist en eulz qualitez et vertus motives aussi comme il mist pesanteur es choses terrestres, et mist en eulz résistances contres ces vertus motives. Et sont ces vertus et ces résistances d'autre nature et d'autre matière que quelconque chose sensible ou qualité qui sont ici-bas. Et sont ces vertus contre ces résistances tellement modérées, attrempées et accordées que les mouvements sont faits sans violence, et excepté la violence, c'est exactement semblable quant un homme a fait une horloge et il la laisse aller être mue continuellement selon les proportions que les vertus motives ont aux résistances et selon l'ordonnance établie...»

Les études d'Oresme ont été diffusées dans toute l'Europe, en Italie surtout, mais aussi à Vienne, Heidelberg et Cologne, comme l'attestent les registres de ces universités.
Sa démarche n'a donné lieu à aucune interdiction, il sera même récompensé pour son travail, et nommé évêque de Lisieux en 1377.
L'histoire oublie ainsi trop facilement l'apport des maîtres du moyen âge qui ont contribué à enrichir un terreau d'où ont germé nombre d'idées modernes.

 


Description d'une éclipse de lune par Nicole Oresme dans son "Traité de la sphère" (vers 1350)

La révolution copernicienne : le retour de l'héliocentrisme





Tout comme ses prédécesseurs catholiques, le chanoine polonais Nicolas Copernic va remettre en cause au cours du XVIème siècle les fondements du modèle aristotélicien, en évitant d'y mêler les Saintes Écritures.
Après étude de ses propositions par l'Église, Copernic sera félicité par le cardinal Schönberg pour l'élaboration du modèle héliocentrique dans une lettre adressée le 1er novembre 1536, en ces termes :
"J'ai appris que non seulement tu connais admirablement les découvertes des anciens mathématiciens, mais que même tu as constitué une doctrine du monde, selon laquelle la terre se meut, tandis que le soleil occupe le lieu le plus bas et, par conséquent, le plus central de l'univers."
Son œuvre maîtresse, "De revolutionibus orbium coelestium", qui reprend des travaux marginalisés des grecs Aristarque de Samos entre autres sur la rotation annuelle de la terre autour de soleil, sera dédicacée au Pape Paul III.
Son étude constitue une rupture radicale avec le système géocentrique d'Aristote, et ne déclenche pas de protestation au sein de l'Église, car ses propositions sont présentées comme des hypothèses scientifiques, contrairement à Giordano Bruno, qui ne considérait l'Univers que sur les bases de la magie et l'ésotérisme, ou Galilée, qui affirmait en vérité quasi théologique son héliocentrisme.




Le mathématicien, physicien et astronome Johannes Kepler, contemporain de Galilée, est le premier à avoir extirpé la substantifique moelle du mouvement des planètes, travail basé sur une étude très fine des relévés de leurs positions (il consacrera plus de dix ans sur ce sujet).
- « Chaque planète se meut autour du soleil dans une orbite plane et le rayon vecteur mené du soleil à la planète décrit des aires égales en des temps égaux. »
« La courbe décrite par chaque planète est une ellipse dont le soleil occupe l’un des foyers. »
« Les carrés des temps des révolutions des planètes sont entre eux comme les cubes de leurs distances moyennes au soleil. »
On remarque qu'il n'y a plus de religion dans l'énoncé de ces lois, et que le modèle aristotélicien qui a fait tant de mal à la science vole en éclat, les orbites ne sont plus circulaires, mais elliptiques.

A noter que même Kepler n'échappera pas à la mise à l'index par l'Église catholique de certains de ses ouvrages, parce qu'ils reprennent en partie les mêmes théories pseudo-hermétiques non scientifiques de l'Univers, dans lesquelles Kepler soutient à son tour que la Terre a une âme, puisqu’elle serait soumise à l’harmonie unificatrice des astres.
Dans "l'harmonie du Monde" (1619), on peut trouver par exemple des élucubrations du genre :
« La Terre chante Mi, Fa, Mi : on peut même déduire de ces syllabes que sur notre terre la MIsère et la FAmine règnent »

La magie, l'ésotérisme, la sorcellerie, seront expurgés progressivement des thèses scientifiques dès la fin du moyen-âge par l'Église catholique, ce qui obligera les penseurs, mathématiciens, physiciens, astronomes et philosophes à décorréler la science de la religion et du mysticisme païen moniste.
La pensée scientifique rationnelle était née.

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