Le nazisme, doctrine antichrétienne
L'arrivée de Hitler au pouvoir en janvier 1933 marque un véritable bouleversement dans le monde politique européen et mondial.
Le nazisme est une doctrine viscéralement anti-catholique, le paganisme aryen prêché par Adolf Hitler et
Alfred Rosenberg proclame la supériorité raciale et la destruction des "sous-races", il s'oppose donc à la solidarité humaine, à l'humilité et au pardon de l'Esprit des Évangiles.
Pour s'imposer culturellement et politiquement, le nazisme doit donc anéantir le christianisme.
Dès 1925, dans "Mein Kampf", Adolf Hitler écrivait :
"Chacun peut aujourd'hui constater à regret que, dans le monde antique, beaucoup plus libre que le nôtre, le Christianisme a introduit avec lui la première terreur spirituelle; mais il ne peut rien au fait que, depuis cette époque, le monde vit sous le signe et sous la domination de cette contrainte. Et on ne brise la contrainte que par la contrainte, la terreur par la terreur. C'est alors seulement que l'on peut instituer un nouveau régime."
Le Pape Pie XI tente d'apaiser ces tensions en signant un concordat dès l'accession de Hitler au pouvoir en 1933, mais cet accord ne fait guère illusion : les écoles catholiques sont bientôt dénaturées, les prêtres persécutés. Hitler déclarera en 1937 dans une école de Sonthofen qu'il fallait
"écraser l'Église catholique comme un crapaud !".
Les manifestations catholiques, comme la Pentecôte, ou la «Journée internationale de la société catholique» à Munich, co-organisée par le théologien Johannes Neuhäusler, sont réprimées.
Les crucifix sont retirés des écoles catholiques, considérés comme "symboles de superstition".
Le 30 juin 1934, lors de la
"Nuit des Longs Couteaux", les nazis organisent une purge politique en assassinant méthodiquement les principales figures catholiques du pays opposées au nazisme.
Cet anti-catholicisme met en émoi les instances religieuses et le clergé en Allemagne, ainsi que des militaires de la Wehrmacht qui veulent se débarrasser du régime nazi.
Eugenio Pacelli, devenu le Pape Pie XII en mars 1939, vicaire du Christ,
fut le chef catholique du combat idéologique qui opposera en Europe dans
une lutte sans merci, le christianisme au nazisme.
En 1934, le cardinal et archevêque de Munich Michael von Faulhaber publie "Judenum, Christentum, Germanentum" (judaïté, christianité, germanité), un manifeste qui s'oppose au nazisme en défendant l'amitié entre les peuples. Il écrit :
"Il faut que s'opère dans notre peuple une transformation des esprits, que pâlisse le nimbe de l'uniforme et des parades militaires et que soient jetés au bric-à-brac des musées les vieux chants de guerre... Un nationalisme morbide (ein krankhafter Nationalismus) déferle sur notre peuple. Ce qu'on veut, c'est anéantir tous les essais de réconciliation avec l'ennemi d'hier. Prêter l'oreille au premier hurleur venu, ce n'est pas là faire œuvre de patriote".
Le cardinal et archevêque de Munich Michael von Faulhaber, fut un véritable résistant au nazisme. En 1938, son rejet ouvert de l'antisémitisme gouvernemental lui vaut d'être pris à partie directement par les militants nazis. Le Gauleiter dénonça le cardinal comme représentant de « la juiverie mondiale et ses alliés noirs et rouges », et une foule s'attaquera au palais épiscopal du « cardinal juif ».
Face à la politique doctrinaire du IIIème Reich d'extermination des plus faibles, le 3 août 1941, le prêtre Clemens August von Galen, déclarera dans un sermon :
« C'est une doctrine effrayante que celle qui cherche à justifier le meurtre d'innocents, qui autorise l'extermination de ceux qui ne sont plus capables de travailler, les infirmes, de ceux qui ont sombré dans la sénilité… N'a-t-on le droit de vivre qu'aussi longtemps que nous sommes productifs ? ».
L'euthanasie avait déjà été fermement condamnée par Pie XII le 15 décembre 1940, et en Allemagne le 9 mars 1941, l'évêque catholique de Berlin,
Konrad von Preysing, dénonçait en chaire de vérité les meurtres baptisés « euthanasies ».
Le prêtre allemand Clemens August von Galen, surnommé le « Lion de
Münster », acquit une réputation de principal opposant de l'Église
d'Allemagne au Troisième Reich, à la suite d'une série de sermons contre
l'euthanasie des invalides, contre les attaques à l'encontre de
l'Église et contre les droits de l'Homme.
Les persécutions nazies dénoncées : un réseau d'information se constitue
Des dignitaires de l'Église catholique vont alors mettre en place un réseau de collectes d'informations sur les violences et persécutions contre les catholiques à travers les évêchés en Allemagne, et en informer le pape Pie XI et son secrétaire d'État et cardinal Eugenio Pacelli, futur Pape Pie XII au Vatican.
Bien que ces derniers ne se mettront jamais directement en risque, il était évidemment hors de question d'impliquer directement les principales figures du Vatican dans un système de réseau d'espionnage.
Le prêtre Johannes Neuhäusler va s'employer à recueillir et structurer cette masse d'informations, qu'il fera passer au Vatican par un agent très spécial, l'avocat et fervent catholique Josef Müller.
Müller fera de multiples voyages entre Berlin et Rome pour acheminer ces documents.
L'avocat Josef Müller, dit "Jo le bœuf" (Ochsensepp), fut une des grandes figures de la résistance catholique allemande au nazisme, et un des principaux informateurs du Vatican sur les exactions commises en Allemagne contre les catholiques.
En 1943, il est arrêté par la Gestapo, déporté successivement dans les camps de concentration de Buchenwald et Flossenbürg où il est torturé, et Dachau. Il est libéré le 5 mai 1945 par la quinzième armée américaine, pendant son transfert par la SS en tant que prisonnier spécial dans le Tyrol du Sud. Après la guerre, Il deviendra un homme politique, chef du parti l'Union chrétienne-sociale en Bavière (CSU).
Johannes Neuhäusler, prêtre catholique, virulent opposant au nazisme en Allemagne, il est arrêté en 1941, et interné comme prisonnier spécial dans les camps de concentration de Sachsenhausen et Dachau. Libéré, il deviendra en 1947, évêque auxiliaire de l'archidiocèse de Munich et de Freising.
Les deux informateurs vont prendre des risques considérables qui les mettront sous l'œil des services de renseignements allemands.
Les documents transmis par Josef Müller à Rome sont réceptionnés par le théologien Robert Leiber et Monseigneur Ludwig Kaas, qui en font un rapport direct à Eugenio Pacelli.
Le jésuite allemand Robert Leiber (à droite) est un proche conseiller du Pape Pie XII (à gauche) au Vatican, il agira comme intermédiaire entre le Pontife et la résistance allemande face au nazisme, notamment grâce à l'informateur Josef Müller qu'il rencontre fréquemment jusqu'en avril 1943.
Le prêtre Ludwig Kaas, supplééra Robert Leiber comme intermédiaire entre le Pape Pie XII et la résistance allemande face au nazisme.
En particulier pendant l'invasion de la Pologne, des centaines de prêtres sont systématiquement fusillés, on arrêtait et déportait par ailleurs vers le camp d'Oranienbourg, des catholiques, intellectuels, ecclésiastiques ou laïcs. Ce programme avait pour objectif l'élimination de l'élite intellectuelle et de l'influence traditionnelle du clergé. Müller mentionne également dans son dossier
"l'extermination systématique des juifs", avec
"des hommes, des femmes, des enfants entassés dans des tranchées qu'ils devaient eux-mêmes creuser, mitraillés comme des sardines en boîtes".
Le cardinal Eugenio Pacelli étudiera attentivement ces documents pour rédiger des notes de protestation et faire pression sur Berlin.
Pour service rendus et les risques pris, Josef Müller aura le privilège de se marier le 29 mars 1934 dans la crypte secrète de la Basilique Saint-Pierre de Rome, où est censée se trouver la sépulture de Saint-Pierre. C'est Johannes Neuhäusler qui officiera pendant la cérémonie de mariage.
Afin de dénoncer de manière plus vigoureuse le système nazi qui se fait de plus en plus répressif, en 1937 le cardinal Michael von Faulhaber rédige le brouillon initial de la fameuse encyclique du Pape Pie XI
"Mit brennender Sorge" (avec une brûlante inquiétude), dénonçant le national-socialisme.
Ce premier jet est ensuite complété et durci par Eugenio Pacelli qui condamne le racisme, le naturalisme, le non-primat des principes de grâce et de dignité humaine, la remise en question de la valeur de la vie humaine, le culte de l'État et du chef, et le paganisme.
Johannes Neuhäusler fera imprimer et distribuer clandestinement en Allemagne plus de 40 000 exemplaires de cette encyclique papale.
Le Pape Pie XII organise une résistance efficace et discrète
Devenu le Pape Pie XII en mars 1939, Eugenio Pacelli va résolument se tourner vers la résistance allemande contre le nazisme, il déclarera, comme solution politique pour l'Allemagne, d'après Robert Leiber :
"N'importe quel gouvernement, sans Hitler".
Même si cette déclaration pose un cas de conscience, mûrement réfléchi, dans la manière d'évincer Hitler, y compris la possibilité de son assassinat.
Pour couvrir le réseau allemand, le Pape se fera désormais plus mesuré et discret dans ses propos publics contre le nazisme pendant la guerre, afin d'éviter d'attirer l'attention sur les réseaux de communication avec la résistance allemande.
La dénonciation directe et violente contre le régime nazi, est sujette à des contre-coup incontrôlables et dévastateurs pour les populations opprimées. Lors de la protestation violente et vigoureuse contre le sort des Juifs aux Pays-Bas, la répression s'est accélérée, quasiment tous les Juifs du pays ont été déporté et ont fini en camp de concentration.
Le 2 août 1942, une semaine après les protestations, les autorités
allemandes se voient dans l’obligation de
"poursuivre les catholiques
juifs comme leurs pires ennemis, et d’assurer plus rapidement leur
déportation vers l’est".
Müller expliquera après la guerre que le réseau d'information antinazie en Allemagne a toujours fortement insisté pour que le Pape s'abstienne de faire des déclarations publiques stigmatisant les nazis, et, en particulier, les condamnant, et de faire en sorte que ses remarques s'en tiennent toujours à des généralités.
Pendant la guerre, Pie XII aide des organisations juives et les banques de l'Église versent des sommes considérables en dollars américains pour aider des Juifs à sortir d'Europe en coordination mondiale avec les communautés juives de Bolivie, du Costa-Rica, de l'Afrique du Sud, du Chili, de l'Union des rabbins orthodoxes d'Amérique et du Canada, et du grand rabbin de Zagreb.
Lors de la déportation des Juifs de Rome par les nazis, Pie XII interviendra directement le 16 octobre 1943, en coulisses, auprès du gouverneur allemand de Rome, le général Stahel, pour faire cesser les arrestations, mais sans parvenir à faire arrêter un train de déportation de 1 007 Juifs à bord.
Sous la pression, et dans une position délicate face à l'avancée des Alliés, pour éviter un échec militaire, Himmler ordonnera l'arrêt de la poursuite de ces arrestations. Selon une recherche récente du spécialiste Dominiek Oversteyns,
cette action directe du Pape permit de sauver la vie à plus de 11 400 juifs.
Les officiers du renseignement allemand, l'Abwehr, entrent en scène
Le 27 septembre 1939, après le déclenchement de la guerre contre la France, la recherche des opposants politique à Hitler s'accentue en Allemagne, Josef Müller, sous pression, est convoqué à Berlin par les officiers de l'Abwehr, le service de renseignement militaire, pour répondre de ses activités soupçonneuses.
Il est reçu par l'amiral Wilhelm Canaris, chef de l'Abwehr, et par son adjoint le colonel Hans Oster. Ils lui signifient qu'ils ont découvert ses activités d'informateur espion du Vatican.
Mais au lieu de le mettre aux arrêts...ils lui proposent un plan pour renverser Hitler, et veulent établir une relation avec le Pape, que Müller leur serve d'intermédiaire auprès des puissances internationales afin de décider d'une paix juste post-hitlérienne, et convaincre les Alliés qu'un autre gouvernement est possible.
Wilhelm Canaris est une connaissance personnelle du Pape, en effet, en 1920, l'amiral faisait des promenades à cheval avec Eugenio Pacelli, alors nonce apostolique à Berlin, et connaît son aversion pour Hitler.
L'amiral Wilhelm Canaris, chef de l'Abwehr, le service de renseignement militaire allemand, appuie différentes tentatives afin de renverser Adolf Hitler en lien avec le Vatican, qui toutes échouent. Accusé d'avoir pris part au complot d'assassinat du Führer le 20 juillet 1944, il est arrêté le 28 juillet 1944 et envoyé dans le camp de concentration de Flossenbürg avant d'être condamné à mort par un tribunal spécial, et exécuté par pendaison le 9 avril 1945.
Le colonel Hans Oster, adjoint de Wilhelm Canaris, fait partie du réseau de conspiration contre Hitler. Il est arrêté par la Gestapo le 21 juillet 1944 pour tentative d'assassinat de Hitler, et exécuté par pendaison le 9 avril 1945 dans le camp de concentration de Flossenbürg.
Durant cet entretien avec Josef Müller, Hans Oster déclarera par ailleurs :
"La direction des services de l'Abwehr, ici même à notre quartier général, est en même temps le quartier général de l'opposition de l'armée allemande à Hitler...Je suis moi-même favorable au renversement de ce criminel, par le recours à l'assassinat."
Wilhelm Canaris et des généraux anti-nazis couvrent désormais les contacts de Müller au Vatican, qui se rendra plus de 150 fois à Rome en trois ans.
Renverser Hitler : Le rapport-X
La résistance allemande sous l'égide de Canaris et Oster, tente de mettre au point une première tentative d'assassinat de Hitler, par l'intermédiaire d'
Erich Kordt, qui devait recevoir un engin explosif.
Le 8 novembre 1939, pendant un discours du maître du Reich, ils sont devancés par le communiste
Georg Elser qui tente de tuer le Führer en faisant exploser une bombe dans la brasserie où il donne son discours.
Mais l'attentat échoue, Hitler ayant abrégé son discours, est parti trop tôt, la bombe fait 8 morts et 63 blessés.
Cette tentative ratée compromet les plans de Canaris, la sécurité de Hitler est grandement renforcée, les dépôts de munition étroitement surveillés, il devient plus compliqué de se procurer facilement une bombe.
Un nouveau plan est mis en place en mars 1940 mettant en étroite collaboration le diplomate anglais D'Arcy Osborne, proche du Pape Pie XII avec lequel il aura de nombreux entretiens, Monseigneur Ludwig Kaas, Robert Leiber, Josef Müller et les militaires de la résistance allemande pour rédiger un document prévoyant les conditions de reddition de l'Allemagne après le renversement d'Hitler, le "Rapport-X", dans ses grandes lignes :
- l'élimination de Hitler
- rétablissement de la "règle de droit" en Allemagne
- aucune guerre à l'Ouest
- l'Autriche reste allemande
- libération de la Pologne
- autodétermination
- armistice par l'intermédiaire du Pape
Le duc D'Arcy Osborne, diplomate envoyé spécial du gouvernement britannique à Rome, séjournera dans la cité du Vatican de 1940 à 1944, et jouera un rôle clé dans le complot visant à renverser Hitler en mars 1940, impliquant le Pape et des généraux de la résistance allemande. Face à l'invasion de la France en mai 1940 et la guerre ouverte déclarée contre l'Angleterre, le duc abandonnera cette voie.
Mais après l'invasion de la France et l'attaque contre l'Angleterre par l'Allemagne nazie en mai-juin 1940, la voie diplomatique semble compromise et sans issue. Le "Rapport-X" restera archivé et lettre morte.
La résistance catholique se tourne alors vers des actions plus radicales.
Le "Comité des Ordres", réseau de résistances de Dominicains et des Jésuites
Le 26 mai 1941 le père jésuite Augustin Rösch, et la hiérarchie des jésuites et des dominicains en Allemagne juraient de soutenir et de "préserver notre honneur de catholique, devant notre conscience, devant le peuple, devant l'Histoire, l'Église et notre Seigneur Dieu". Ils créent alors ce qui deviendra le "Comité des Ordres", réseau de résistance actif contre le régime nazi, restant en liaison étroite avec le Vatican.
Le 13 septembre 1941, le prêtre jésuite Augustin Rösch sera reçu dans le quartier général à Berlin de l'Abwehr par le juriste et officier Helmuth James von Moltke, pour discuter du combat à mener contre le nazisme, ce dernier sera associé au "Comité des Ordres". Pour son activisme, Robert Leiber surnommera Augustin Rösch "l'homme fort du catholicisme en Allemagne". Recherché par la Gestapo après l'attentat manqué contre Hitler le 20 juillet 1944, il se réfugiera clandestinement dans l'abbaye de Moosen.
Helmuth James von Moltke, juriste des services de renseignements
allemands de l'Abwehr, membre du réseau catholique le
"comité des Ordres", est une figure emblématique de la résistance
contre le nazisme ayant pour objectif de planifier le renversement de
Hitler. Ses activités mises à jour, il sera arrêté en janvier 1944,
puis exécuté par pendaison le 23 janvier 1945 à la prison de Plötzensee.
Le "Comité" incorporera également à partir de février 1942, leur agent le plus charismatique, le père jésuite Alfred Delp. Avec Augustin Rösch, ils seront les principales figures catholiques justifiant théologiquement le combat contre Hitler et même son assassinat, en se référant à Saint Thomas D'Aquin.
Le père jésuite Alfred Delp, éminent théologien et guide de l'organisation du "Comité des Ordres" conspirant contre Hitler. Après l'échec de la tentative d'assassinat du Führer du 20 juillet 1944, Delp fut arrêté le 28 juillet 1944. Jugé, torturé et exécuté par pendaison le 2 février 1945 à la prison de Plötzensee, il agonisera pendant une vingtaine de minutes suspendu à une corde sur un croc de boucher.
Le juriste catholique allemand Hans von Dohnányi, membre actif du réseau
"Comité des Ordres", a sauvé des Juifs
et participé à la résistance allemande face au nazisme en compagnie de sa
femme et de ses beaux-frères. Le 5 avril 1943, il est arrêté par la
Gestapo, et exécuté quelques semaines avant la fin du Troisième Reich,
le 9 avril 1945, par pendaison.
Le réseau "Comité" obtiendra l'aval du Pape Pie XII à mots couverts pour liquider Hitler, en arguant que les Allemands étaient confrontés à des "pouvoirs diaboliques", et qu'il fallait "mener notre guerre contre les puissances du mal". L'assassinat est donc permis "en cas de nécessité morale pressante, afin d'aider à préserver la libre volonté du peuple, qui lui avait été conférée par son Créateur".
Attentats contre Hitler en mars 1943
Le 13 mars 1943, Wilhelm Canaris et Hans Oster se rendent à Smolensk avec un paquet contenant une bombe.
Ils espèrent pouvoir faire sauter l'avion de Hitler alors de retour vers Munich.
Fabian von Schlabrendorff est chargé de transmettre le paquet, en le faisant monter à bord de l'avion comme un colis contenant deux bouteilles de Cognac, un présent à l'intention du colonel Stieff.
Mais, un problème technique survient, le mécanisme de la bombe ne se déclenche pas. Hitler s'en sort sans se rendre compte qu'on a tenté de le tuer.
Autre tentative quelques jours plus tard, le 22 mars 1943, lors de la commémoration du jour du Héros à Berlin, la journée de glorification de l'armée allemande contre les adversaires du nazisme. une bombe est confiée au baron
Rudolf von Gersdorff, pour liquider Hitler, mais le Führer part trop tôt, l'attentat est annulé.
Arrestation de Josef Müller et Hans von Dohnányi
Plusieurs autres opérations sont organisées par le "Comité" comme l'exfiltration vers la Suisse de Juifs, l'opération U-7, orchestrée par Wilhelm Canaris et
Dietrich Boenhoffer.
Mais l'opération tourne mal. Lors d'un contrôle, de l'argent est retrouvé en quantité sur
Wilhelm Schmidhuber un membre du "Comité des Ordres".
Le 5 avril 1943, il est arrêté, tabassé, et finit par parler.
Cette dénonciation conduit à l'arrestation de Hans von Dohnányi et Josef Müller en avril 1943.
La perte de Josef Müller pour la résistance allemande est lourde, entrave les manœuvres des membres du réseau du "Comité", mais n'empêche pas que l'organisation puisse continuer ses actions.
L'attentat du 20 juillet 1944 : Claus von Stauffenberg
Le réseau du Pape a tenté à plusieurs reprises d'entrer en contact avec Claus von Stauffenberg, un colonel allemand fervent catholique, opposé en privé à Hitler notamment à cause de sa haine des Juifs. Après avoir été sérieusement blessé le 7 avril 1943 sur le champ de bataille en Tunisie (main droite amputée, et perte de l'œil gauche), Stauffenberg franchira le pas en entrant en résistance dans le réseau "Comité des Ordres". Ses agents de liaison avec le Vatican seront principalement
Paul Franken et
Albrecht von Kessel, en contact avec Robert Leiber et Ludwig Kaas.
Stauffenberg ne supporte pas l'antisémitisme de Hitler, la nazisme est pour lui incompatible avec une vie chrétienne. Il dira :
"Enfin je suis catholique et nous avons une très ancienne tradition justifiant que les tyrans puissent être assassinés".
Sur le serment de fidélité qui lie tout soldat à son supérieur, Stauffenberg expliquera que
"En catholique fidèle, j'étais lié par le devoir d'agir à l'encontre de ce serment."
Pendant les réunions au "Comité des Ordres" Stauffenberg s'accordera avec les autorités ecclésiales, en particulier avec Alfred Delp, sur la justification théologique de se débarrasser physiquement d'un tyran.
Pour contrer de nouvelles tentatives révolutionnaires de prise de pouvoir, Wilhelm Canaris suggérera judicieusement auprès des autorités nazies de mettre en place
le plan "Valkyrie" préparé par l'Abwehr. Ce programme prévoit la possibilité pour des officiers de prendre des initiatives afin d'empêcher un coup d'état. C'est sous couvert de ce faux programme que va se préparer un nouvel attentat contre Hitler et la tentative de prise de pouvoir par des généraux anti-nazis. Canaris intègre Stauffenberg dans ce programme le 31 juillet 1943.
Le colonel allemand Claus von Stauffenberg, figure de la résistance catholique du "Comité des Ordres", prendra part au plan "Valkyrie", une couverture qui lui permet d'approcher Hitler et de déposer une bombe près de lui pendant une réunion le 20 juillet 1944. L'attentat échoue, le Führer est juste légèrement blessé, Stauffenberg sera arrêté et fusillé le lendemain.
Le 20 juillet 1944, tout est prêt pour l'attentat. Pendant une réunion stratégique à Berlin, Stauffenberg dépose près de Hitler une sacoche contenant un explosif, et s'en va prétextant un coup de téléphone à passer.
Le colonel Claus von Stauffenberg (à gauche), le 15 juillet 1944 dans la Tanière du loup en Prusse-Orientale, cinq jours avant l'attentat, vient saluer Hitler.
En sortant, après quelques minutes, il entend une violente déflagration : la bombe a explosé ! Il se rend immédiatement au quartier général de réserve et de l'intérieur à Berlin.
Avec son complice l'Oberleutnant
Werner von Haeften, Stauffenberg fait arrêter le général Fromm qui l'empêche de passer, ce dernier ne croyant pas à l'assassinat de Hitler.
Stauffenberg contacte alors pendant plusieurs heures les généraux allemands aux quatre coins de l'Europe, pour leur annoncer la mort de Hitler, et la chute du régime nazi, et que les généraux prennent officiellement le pouvoir dans le cadre du plan "Valkyrie".
Mais bientôt, la nouvelle se répand : Hitler n'est que légèrement blessé, la sacoche contenant la bombe a été déplacée pendant la réunion, ce qui a sauvé le Führer. Des officiers loyalistes reprennent le contrôle des opérations et font arrêter Stauffenberg et Haeften.
Leur complot dévoilé, ils seront fusillés devant un peloton d'exécution la nuit même.
Arrestation des officiers de la résistance allemande
L'échec de l'attentat du 20 juillet 1944 est une catastrophe pour les conspirateurs du réseau du "Comité des Ordres", qui tombe comme un château de cartes.
Alfred Delp, qui fut en relation directe avec Stauffenberg, est arrêté le 28 juillet 1944, il sera torturé et pendu le 2 février 1945, sans donner les noms de ses complices, et Augustin Rösch doit fuir et se cacher jusqu'à la fin de la guerre.
Hans Oster est arrêté le 21 juillet et Wilhelm Canaris le 29 juillet, soupçonnés d'avoir pris part au complot.
Dans le cadre de l'opération "Thunderstorm", le Reich va ainsi éliminer tous les conspirateurs du "Comité des Ordres".
Le 22 septembre 1944, en fouillant dans les archives de l'Abwehr, les nazis tombent sur des notes du "Rapport-X" impliquant directement le Vatican et les officiers du renseignement déjà emprisonnés, Wilhelm Canaris et Hans Oster. Ces documents signent leur arrêt de mort, ils seront tous les deux pendus le 9 avril 1945.
Fin de la guerre
Le 1er juin 1945, après sa libération par les Américains, Josef Müller sera reçu par le Pape Pie XII à Rome pendant trois heures, le Pontife sera admiratif et reconnaissant du combat mené par ce résistant, durant ces années noires.
Le Pape Pie XII bénissant la foule, après un raid aérien américain sur Rome en août 1942
Propagande anti-catholique pendant la guerre froide
En 1963, pendant la guerre froide, pour décrédibiliser le Pape Pie XII et l'Église catholique ouvertement anti-communiste, les soviétiques vont récupérer une fiction théatrale écrite par l'Allemand Rolf Hochhuth,
"Le Vicaire", voulant montrer la prétendue inaction du Pape face à la barbarie nazie contre les Juifs, pour en faire un message de propagande politique.
La pièce sera réécrite et diffusée dans les plus grandes villes du bloc de l'Est, ainsi qu'à Londres, Paris, New-York, Vienne ou encore Tel-Aviv.
Dans les années 1970, cette propagande est alimentée par les progressistes anti-catholique athées. Elle atteindra son paroxysme en 2002, la pièce controversée de Hochhuth sera adaptée en film par le réalisateur Costa-Gavras, avec Mathieu Kassovitz dans le rôle d'un prêtre, Ricardo Fontana, qui n'a jamais existé dans la réalité.
Ce prêtre de fiction tente d'alerter le Pape qu'un génocide des Juifs est en cours, mais ce dernier reste froid, sourd et indifférent, expliquant qu'il "veut la paix à tout prix" avec Hitler, et ne fait donc rien. Il devient de fait un complice du nazisme.
Aucun des protagonistes proches du Pape tels Robert Leiber, d'Arcy Osborne, Ludwig Kaas ou Josef Müller, qui ont joué un rôle fondamental dans la résistance catholique au sein du Vatican, ne sont mentionnés dans le film.
L'affiche du film de propagande anti-catholique "Amen." de Costa-Gavras sorti en 2002, avec en vedette Mathieu Kassovitz dans le rôle d'un prêtre fictif. La croix chrétienne et la croix gammée sont entremêlées, dans le but de montrer une soi-disant complicité entre les actions du Pape Pie XII et le Reich nazi.
La reconnaissance internationale des actions de Pie XII
Cette propagande idéologique sans fondements, est largement démentie par les faits historiques, et la reconnaissance internationale des actions du Pape, en particulier par la communauté juive.
En 1963,
Pinchas Lapide, qui fut consul d’Israël à Milan pendant le pontificat de Pie XII, déclare au journal Le Monde :
"Je peux affirmer que le Pape, le Saint-Siège, les nonces et toute l’Eglise catholique ont sauvé de 150.000 à 400.00 juifs d’une mort certaine… L’église catholique sauva davantage de vies juives pendant la guerre que toutes les autres églises, institutions religieuses et organisations de sauvetage réunis". (Le Monde le 13 décembre 1963).
"Pendant la décennie de terreur nazie, quand notre peuple a subi un martyre terrible, la voix du Pape s'est élevée pour condamner les persécuteurs...Nous pleurons un grand serviteur de la paix."
Golda Meir, Premier Ministre israélien, octobre 1958.
Le 25 décembre 1942 dans son message radio-diffusé de Noël, le pape Pie XII évoque
"les centaines de milliers de personnes qui, (…) par le seul fait de leur nationalité ou de leur race, ont été vouées à la mort ou à une extermination progressive". Le lendemain, le New-York Times salue
“le Pape (qui) se place à l’opposé de Hitler".
Le 13 février 1945, Israële Zolli (1881-1956), Grand Rabbin de Rome, se convertit au catholicisme et prend pour nom de baptême Eugenio, en hommage à Pie XII.
Le 29 novembre 1945, la United Jewish Appeal envoie une délégation de 70 rescapés des camps de concentration au Vatican pour exprimer à Pie XII la reconnaissance des juifs pour son action en leur faveur. (L’Osservatore Romano, 30-11-1945).
Le 26 mai 1955, 94 musiciens juifs, sous la direction de Paul Kletzki, ont joué sous les fenêtres du Vatican
« en reconnaissance de l’œuvre humanitaire grandiose accomplie par le Pape pour sauver un grand nombre de juifs pendant la seconde guerre mondiale »
Cet article n'a pas la prétention de lister tous les résistants au nazisme; hommage donc à ceux qui se sont battus, au prix de leur vie, contre cette barbarie totalitaire.
sources :